Histoire pour concours de nouvelles

Comme dans un rêve…

La lumière allumée attira son attention. Plus qu’une lumière, son attitude l’attira.

Il se trouvait devant un restaurant piano bar, un restaurant à la lumière tamisée, aux nappes et au sol de velours rouges. Que faisait-elle là ? Il ne la connaissait pas, mais il se sentit pris d’une envie irrésistible d’aller lui parler. Il ne réfléchit pas et entra dans ce restaurant à l’ambiance douce et énigmatique.

Une femme rousse, les cheveux longs, se tenait là de dos, seule, buvant un verre de martini rouge. Son regard respirait une sensualité unique, une sensualité jamais connue de John.

Il s’installa dans un premier temps à une table, assez loin d’elle afin de pouvoir l’observer.

Elle buvait lentement. Sa façon de s’humidifier les lèvres, le déconcertait.

La chanteuse commença à chanter et les lumières s’éteignirent pour laisser place à une ambiance feutrée. Il commanda un whisky, et se laissa porter par cette ambiance envoutante. Tout semblait irréel.

Il donnait de temps en temps des petits coups d’œil dans la direction de la jeune femme, tentant de dissimuler son attraction plus qu’évidente. Plus qu’une attraction physique, c’était une attraction énergétique, charnelle, sexuelle, sensuelle, inexplicable.

John avait eu beaucoup de conquêtes et n’avait encore jamais ressenti cela. Il se sentait comme possédé, impossible pour lui de détourner son regard.

La chanteuse termina son premier morceau, quand la jeune femme se leva pour rejoindre les toilettes.

Elle était vêtue d’une longue robe noire à sequins. Elle n’avait pas l’air d’attendre quelqu’un.

Il attendit son retour pour se jeter à l’eau et aller l’aborder. À ce moment-là, un bruit de verre cassé se fit entendre. Cela venait des cuisines. Une altercation éclata. Des mots incompréhensibles, dans une langue inconnue. Était-ce la belle inconnue ? Connaissait-elle le patron ? Était-elle en danger ?

Il se sentit soudain missionné d’aller la protéger. Il se leva et la vit revenir. Elle avait l’air tout à fait détendue. Et elle n’avait sûrement rien à voir avec l’altercation. Il était décidément bien troublé.

Il la laissa s’assoir avant d’aller la rejoindre.

  • Bonsoir, cette chaise est-elle libre ?
  • Elle lui fit un signe de la tête pour lui spécifier qu’elle l’était, mais ne répondit pas.

Il s’installa et se présenta.

  • Bonsoir. Je vous ai aperçue depuis la rue et j’ai été inexplicablement attiré par vous. Je ne saurai l’expliquer. Et j’aimerais comprendre ce qui m’attire en vous.
  • Irena, enchantée.
  • Veuillez excuser ma curiosité Irena, mais vous êtes venue seule ici ?
  • Et vous ?
  • À vrai dire, je ne suis pas réellement venu ici.
  • Moi non plus…

Ses réponses étaient vraiment énigmatiques.

Elle avait une assurance et une discrétion troublantes. 

John avait l’impression d’être tombé amoureux en seulement un quart de seconde.

Il ne contrôlait plus rien. Était-ce de l’amour réellement ou du désir simplement ?

La chanteuse, entama la deuxième partie de son spectacle. 

«  Je suis venu te dire que je m’en vais, tu te souviens des jours anciens et tu pleures, tu suffoques, tu blêmis, maintenant qu’a sonné l’heure… »

Cette chanson lui rappela de douloureux souvenirs. Une petite larme coula sur sa joue. Il baissa les yeux et Irena touchée par cette démonstration lui caressa le visage afin d’essuyer sa larme.

Elle ne parlait pas beaucoup, il n’y avait pas besoin de parler d’ailleurs. L’air entre eux était électrique, comme s’ils se connaissaient d’une autre vie.

Un désir irrésistible montait en lui. Un désir de la connaître davantage, de la toucher, de la sentir, de la voir rire, de partager des moments heureux…

Était-ce cela le coup de foudre ?

Irena avait un petit accent, il ne l’avait pas remarqué jusqu’alors…

Elle se leva de nouveau et John nota qu’elle se dirigea de nouveau vers les toilettes ou plutôt les cuisines.

Que se passait-il dans ces cuisines…

Il se leva discrètement, et la suivi. 

Elle se tenait de dos face au cuisinier et parlait dans cette fameuse langue inconnue de John. Peut-être du russe ? Ou du Slovaque ? Irena avait une attitude plutôt anxieuse et semblait apeurée. Le cuisinier lui cria de retourner s’assoir.

John se cacha et attendit un petit moment avant de regagner sa table.

Le show de la chanteuse se termina. Tout l’auditoire applaudit et Irena se leva de nouveau, se dirigea vers la scène et y monta.

John ne compris pas tout de suite, mais quand elle commença à chanter, il comprit que le cuisinier était probablement son patron. Ou peut-être même pire.

Comment une si jolie femme pouvait-elle être mariée à un homme si vulgaire ?

Elle avait une voix douce et pourtant si puissante. John avait l’impression de vivre un rêve. Il souhaita ne jamais se réveiller. Comment allait-il faire pour rentrer chez lui et l’oublier ? Cela lui semblait simplement inimaginable…

Elle chantait et le dévorait des yeux. Une alchimie évidente existait entre ces deux êtres. Elle semblait l’appeler au secours. 

Le spectacle terminé, Irena regagna les loges et disparu…

John attendit, mais le restaurant se vida et pas de trace d’Irena…

Il se dirigea vers les cuisines pour demander au cuisinier si la chanteuse était toujours là et le cuisinier avait, lui aussi, disparu…

Une étrange impression l’envahit. Était-elle en danger ? John mit du temps à comprendre, mais il comprit. Irena travaillait pour le cuisinier, mais pas seulement en tant que chanteuse. Elle lui appartenait.

Il essaya de nouveau de s’introduire dans les cuisines, mais un gros molosse le stoppa net. John insista et le cuisinier apparu.

  • Que se passe-t-il ici ?
  • Cet homme essaie d’entrer.
  • Je cherche la chanteuse qui était assise à la table du fond.
  • Que lui voulez-vous ? Me répondit-il sur un ton agressif.
  • J’aimerais la féliciter, déclara-t-il. Mais cela était faux.
  • Elle est partie.
  • Ah c’est dommage. Peut-être a-t-elle une adresse ?
  • Dimitri, sors le moi d’ici.

Le gros molosse attrapa John et le flanqua dehors.

John atterrit visage contre terre, la lèvre ensanglantée. Il se releva et fit le tour du restaurant à la recherche d’Irena.

Il la retrouva recroquevillée à l’arrière du restaurant, apeurée, un œil au beurre noir.

Il se dépêcha d’aller lui porter secours. Elle pleurait.

  • Partez, je vous en supplie… Sinon il nous tuera.
  • Comment ça ?
  • S’il vous plait, laissez-moi.
  • Mais c’est impossible.
  • S’il vous plait John…

Il se baissa, l’attrapa, la porta et partir en courant. Elle se débâtit quelques secondes, mais se laissa finalement faire.

Elle avait peur, mais se sentait en sécurité.

Il la déposa à l’arrière de sa voiture et partit en trombe.

Ils arrivèrent chez lui, une belle et grande maison de maître dans un quartier résidentiel protégée d’un grand portail noir en fer forgé.

Il lui proposa de s’assoir pendant qu’il leur préparait une boisson chaude.

Le silence régnait et l’atmosphère se saisi de cet appel au combien charnel. 

Il ne leur fallut pas longtemps pour s’étreindre et se laisser aller à l’appel de la déraison.

Irena était vraisemblablement une prostituée. Son « mac » finirait par la retrouver.

Mais il ne voulait pas encore se l’imaginer. C’était beaucoup trop tôt.

John ne dormit pas cette nuit-là. Il la regarda dormir et profita de chaque seconde à ses côtés. Elle se réveilla, et lui chuchota : Dis-moi plus que des mots d’amour John.

Il la regarda droit dans les yeux et lui susurra des mots d’amour comme il ne l’avait jamais encore fait auparavant. Une frénésie, une ivresse jouissive.

Ils refirent l’amour ardemment pendant des heures et se rendormirent.

À son réveil, John trouva un petit mot sur son oreiller… Elle était partie…

Je suis venue te dire que je m’en vais,

Tes sanglots si longs n’y pourront rien changer

Comme dit si bien Verlaine au vent mauvais

John n’en croyait pas ses yeux !  Pourquoi s’était-il rendormit ? Pourquoi ne l’avait-il pas sentit partir ? Où était-elle partie ? Une immense tristesse l’envahit. Il commença à sangloter, ce qui le réveilla pour de bon.

Il se réveilla en sueur et en pleurs… Il se toucha la lèvre pour vérifier qu’elle n’était pas tuméfiée, mais non John ne rêvait pas, il avait rêvé toute cette histoire, et tout cela n’était qu’un rêve… Un étrange, mais magnifique rêve.

Cette même tristesse l’envahit de nouveau, il baissa les stores et retourna se coucher afin d’essayer de retrouver son mirage et cette légèreté retrouvée à ses côtés.

FIN

HUGUET Sandie

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